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Marie Deniel. D’après la lettre INRA « En direct des labos » n°35, juillet 2010.

INRASi les messages sanitaires relatifs à l’équilibre nutritionnel et à l’activité physique sont connus de tous, comment sont-ils perçus par la population ? Pour apporter une réponse à cette question, le laboratoire Alimentation et Sciences sociales (ALISS) de l’INRA d’Ivry-sur-Seine (http://www.paris.inra.fr/aliss/) a travaillé sur le sujet et nous apporte aujourd’hui des premiers éléments de réponse : la façon de consommer et d’intégrer les recommandations nutritionnelles serait révélatrice de l’appartenance à une classe sociale.

Pour mener son étude, le laboratoire ALISS a réalisé 85 entretiens auprès d’un panel constitué à 90% de femmes âgées de 21 à  ans, toutes catégories sociales confondues et présentant une diversité de corpulence.

Après traitement statistique, 4 groupes se distinguent :

– Pour les catégories aisées, l’alimentation fait partie intégrante de l’hygiène de vie. Elles accordent une attention aux prescriptions, y adhèrent et les mettent en pratique. Soucieuses d’un contrôle de leur poids, ces personnes ont tendance à moraliser leurs pratiques alimentaires.

– Les catégories sociales intermédiaires se montrent très réceptives aux prescriptions nutritionnelles et y consacrent du temps. Ainsi, elles discriminent les aliments “bons” (fruits & légumes) des “mauvais” (sodas & chips). Cependant, de façon presque coupable, elles avouent ne pas toujours s’y conformer dans la pratique.

– Les catégories modestes et populaires connaissent les recommandations nutritionnelles par le biais des médias, des services médicaux et sociaux. Cependant, elles tiennent leur distance vis-à-vis de ces prescriptions qu’elles vivent comme des injonctions extérieures et se sentent coupables de ne pouvoir les suivre.

– Enfin, les catégories les plus précaires ne se préoccupent pas des normes nutritionnelles. Ces femmes sont centrées sur l’approvisionnement, la préparation des repas avec le souci de nourrir quotidiennement leurs enfants. Afin de masquer les difficultés économiques et de réduire le gaspillage, elles préfèrent privilégier le goût.

Cette forte hiérarchie sociale s’explique par une pluralité de facteurs. Le premier cité est le manque de moyens financiers (le prix des fruits et légumes est jugé trop onéreux). Autre facteur : les représentations en matière d’alimentation. Si, pour les catégories aisées, “bien nourrir son enfant” repose sur l’inculcation de principes et un apprentissage à aimer les aliments “sains”, en revanche, pour les catégories modestes à précaires, l’importance est d’offrir une abondance d’aliments, pour assurer la solidité du corps et gâter les enfants dans un contexte social difficile.

Sources : Faustine REGNIER, Ana MASULLO, “Obésité, goûts et consommation. Intégration des normes d’alimentation et appartenance sociale”, Revue Française de Sociologie, 50-4, 2009, p.747-773.