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Les études incriminantes concernant les édulcorants intenses sont de plus en plus nombreuses, malgré leur utilisation jugée sûre par plusieurs agences d’évaluation des risques. En 2014, une étude israélienne révélait un effet du sucralose (E955) sur la composition du microbiote intestinal, ouvrant la voie à de possibles perturbations métaboliques induites par cet additif. Depuis, plusieurs études ont plus ou moins confirmé l’impact des édulcorants intenses en général sur le microbiote intestinal.

La zone intestinale étant également le siège d’une bonne partie des cellules immunitaires, il est également licite de se demander si le E955, suite à des effets sur le microbiote intestinal, pourrait aussi impacter le système immunitaire.

Dans cette étude publiée dans le prestigieux Nature, des chercheurs britanniques se sont focalisés spécifiquement sur l’impact du E955 sur le système immunitaire. Pour ce faire, les chercheurs se sont appuyés sur des expériences in vitro, mais aussi sur des modèles souris.

Dans un premier temps, les chercheurs parviennent à montrer, sur des souris, que le sucralose impacte négativement la prolifération de lymphocytes T, cellules jouant un rôle crucial dans la réponse immunitaire spécifique consécutive à une infection. Ces données pré-cliniques ont été confirmées in vitro, les chercheurs soulignant un effet dose-dépendant du E954 sur la prolifération de ces lymphocytes.

Puis, d’autres expériences menées par les chercheurs, à la fois in vitro et pré-cliniques, montrent cependant que ce n’est pas par des perturbations globales du métabolisme que le E955 perturbe la prolifération des lymphocytes T ; au contraire, le mécanisme d’action semble très localisé, avec un effet sur certaines phases de la maturation des lymphocytes T. Ces phases de maturation sont essentielles pour que les lymphocytes puissent être pleinement fonctionnels. Plus loin, les chercheurs parviennent à montrer que le E955 réduit le flux intra-cellulaire de calcium, mécanisme qui pourrait expliquer son impact spécifique sur les lymphocytes T. Cet effet est très ciblé : en effet, sur d’autres types de cellules immunitaires, le flux calcique n’est pas perturbé, expliquant qu’aucun effet sur ces autres cellules ne soit observé.

Il est important de souligner que dans le cadre de ces expériences pré-cliniques, les auteurs ont également visualisé l’impact du E955 sur des paramètres physiologiques plus « classiques ». Ainsi, les souris ayant consommé du E955, à faible et à forte dose, n’ont pas eu d’impact significatif sur la prise alimentaire, le poids, le pourcentage de masse maigre, ou encore les niveaux circulants d’insuline. Aucun effet tangible sur la composition du microbiote intestinal n’a non plus été retrouvé. Ces résultats suggèrent donc, en parallèle des résultats obtenus sur le système immunitaire, que le sucralose ne semble pas induire de perturbations métaboliques en lien avec l’obésité et le diabète de type 2, tout du moins à l’échelle de cette étude.

Les chercheurs concluent à un nouvel impact du E955 qui n’avait encore jamais été mis en évidence auparavant, à savoir sur le système immunitaire. Les auteurs de l’étude évoquent un effet immunosuppresseur, sans conclure formellement quant à la probabilité d’une sur-infection en cas d’attaque de l’organisme. Sont également soulignées les doses obtenues pour avoir ces effets : supérieures à la consommation moyenne de E955, dose pour laquelle aucun effet notable n’a été observé. Cependant, les chercheurs n’excluent pas les forts consommateurs d’être exposés à des doses ayant des effets sur les lymphocytes T.

 

 

The dietary sweetener sucralose is a negative modulator of T cell-mediated responses.

Article publié le 15 mars 2023 dans Nature.

Lien (open access) : https://doi.org/10.1038/s41586-023-05801-6

 

Lire également le commentaire associé à cette étude.

Sucralose: not sweet enough for T cells.

Commentaire publié le 3 avril 2023 dans Nature Reviews Immunology.

Lien (accès restreint) : https://doi.org/10.1038/s41577-023-00873-x