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Le sel se réinvente

Le sel a toujours été un ingrédient indispensable de l’alimentation humaine, historiquement pour ses propriétés de conservation mais aujourd’hui beaucoup pour son rôle d’exhausteur de goût. Si l’ingrédient semble banal, il gagne des lettres de noblesse en étant valorisé dans des produits (sucrés) à haute valeur ajoutée comme le caramel ou le chocolat à la fleur de sel. En tant qu’aliment, le « Sel de Salies-de-Béarn » ou la « Fleur de sel de Guérande », pour ne citer qu’eux, bénéficient d’une IGP (Indication géographique protégée) tandis que d’autres comme la fleur de sel de l’île de Ré ou de Noirmoutier valorisent une origine garantissant des quantités limitées et un savoir-faire artisanal.

Le sel se réinvente aussi à l’échelle industrielle. Les politiques de réduction du sel dans les produits transformés aperçues ces dernières années se font plus discrètes, le consommateur pouvant être réticent devant un aliment qui pourrait lui sembler fade en annonçant une teneur en sel réduite. Il est évident en revanche que la prise en compte du sodium dans la composante négative du Nutri-Score oblige les industriels à lui accorder toute leur attention lors de leurs travaux de reformulation et de leurs nouveaux développements. Il faut aussi songer que les travaux de réduction voire de suppression des nitrites dans les charcuteries ne peuvent s’envisager sans prendre en compte le rôle technologique du sel.

A l’initiative de  la Fédération des producteurs de sel artisanaux en Europe, à laquelle appartient la coopérative des Salines de Guérande, le sel pourrait aussi bientôt gagner ses galons d’ingrédient bio. Si le sel est à l’heure actuelle exclu du pourcentage des ingrédients d’origine agricole, le nouveau règlement bio en vigueur au 1er janvier 2021 devrait permettre d’étendre les caractéristiques du bio à ces produits issus de méthodes de production artisanales : on pourrait donc à terme trouver du sel de Guérande « bio », en plus de divers labels déjà applicables comme Nature & Progrès ou le Label Rouge.

Sel rose de l’Himalaya, sel bleu de Perse, diamants de sel, fleur de sel, givre de sel, mais aussi gomasio (mélange de sésame et de sel), et si la future tendance autour du sel était celle qu’ont connue tour à tour les matières grasses et les viandes : moins mais mieux ?

Clarisse LEMAITRE, consultante Nutrition et Réglementation, FOODINNOV NUTRITION

INTERVIEW

Valeurs nutritionnelles de référence pour le sodium et le chlorure

Avec la publication de ses avis concernant les valeurs nutritionnelles de référence pour le sodium et le chlorure, l’EFSA met un point final à une tâche entreprise depuis près de 15 ans.

Pourquoi a-t-il fallu autant de temps à l’EFSA pour aboutir à de nouvelles recommandations concernant le sodium et le chlorure ? Quelles sont les spécificités de ces nutriments ?

En 2005, la Commission européenne a demandé à l’EFSA de mettre à jour les valeurs nutritionnelles de référence (VNR) pour les apports en nutriments et en énergie de la population européenne. Depuis, le groupe scientifique de l’EFSA sur les produits diététiques, la nutrition et les allergies (groupe NDA) a adopté 34 avis scientifiques qui couvrent les VNR pour l’eau, les lipides, les glucides, les fibres alimentaires, les protéines, l’énergie ainsi que 14 vitamines et 15 minéraux. Les avis sur le sodium et le chlorure sont les derniers de cette série et marquent la fin d’un important travail de revue scientifique. Pour établir les VNR pour le sodium, l’EFSA a conduit une revue systématique de la littérature, qui repose sur une méthodologie rigoureuse de collecte, d’examen critique et de synthèse des données disponibles suivant un protocole prédéfini. Cela s’intègre dans le cadre méthodologique développé par l’EFSA depuis quelques années afin de promouvoir l’impartialité, la qualité méthodologique et la transparence de ses évaluations, ainsi que leur conformité aux objectifs fixés (projet PROMETHEUS1). En outre, les avis ont été soumis à une consultation publique avant leur publication.

Pourquoi a-t-il été décidé de traiter séparément le sodium et le chlorure au lieu de traiter le sel ? Quelles sont les distinctions au niveau des recommandations ?

Le sodium et le chlorure sont deux nutriments indispensables à l’organisme qui ont un métabolisme et des fonctions propres. Le terme « valeurs nutritionnelles de référence » désigne un ensemble de valeurs repères qui guident les professionnels quant aux quantités de nutriments nécessaires pour garantir l’équilibre nutritionnel d’une personne ou d’un groupe de personnes par ailleurs en bonne santé. Par définition, les VNR s’attachent à établir le besoin nutritionnel et, si nécessaire, la limite de sécurité, de chaque nutriment. Ces valeurs fournissent le fondement scientifique sur lequel peuvent ensuite se baser la formulation de recommandations pratiques en matière d’alimentation, par exemple concernant la consommation de sel. Il n’est pas du ressort de l’EFSA de proposer des repères de consommations alimentaires destinées aux consommateurs. Cela est une prérogative de chaque Etat-Membre. En France, c’est une responsabilité notamment du ministère de la Santé, qu’il met en œuvre par le biais du Programme national nutrition santé (PNNS).

En-dehors du sel et des produits salés, existe-t-il des aliments naturellement contributeurs aux apports en sodium et en chlorure ?

Pratiquement tous les aliments contiennent naturellement du sodium et du chlorure, mais en faibles quantités. La grande majorité du sodium et du chlorure que nous consommons provient du sel, notamment via les produits transformés.

Comparativement au sodium, on entend peu parler de l’importance du chlorure pour l’organisme. Quel est son rôle ?

Le chlorure joue un rôle essentiel dans le maintien de l’équilibre acido-basique et dans la régulation de la balance hydrique de l’organisme. Au niveau de l’estomac, il entre dans la composition de l’acide chlorhydrique qui participe à la digestion des aliments.

Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots en quoi une surconsommation de sodium peut être délétère ? Est-ce la même chose pour le chlorure ? 

Une consommation excessive de sodium favorise l’hypertension, qui est un facteur de risque cardiovasculaire. A ce jour, l’essentiel de la recherche s’est focalisé sur le sodium. Les données disponibles pour le chlorure sont limitées mais indiquent que le chlorure joue également un rôle dans l’association entre sel et pression artérielle. En pratique, les deux éléments sont principalement consommés ensemble, aussi il est difficile d’élucider leurs rôles respectifs. Dans son avis sur le chlorure, le groupe NDA souligne néanmoins la nécessité de conduire des études sur les effets spécifiques du chlorure sur la santé, notamment au vu de l’augmentation de la consommation des substituts de sel tels que le chlorure de potassium2.

Quelle est la valeur considérée comme sûre ? Comment a-t-elle été établie ?

Le groupe NDA considère que 2,0 g de sodium (soit 5 g de sel)  par jour constituent un apport sûr et adéquat pour la population européenne adulte. Cette valeur représente un niveau repère pouvant informer l’établissement par les pouvoirs publics des Etats-Membres de recommandation en matière d’apport en sodium pour la population. Au niveau individuel, un apport habituel en sodium dépassant cette valeur peut être associé à un risque accru de maladies cardiovasculaires, y compris une augmentation de facteurs de risque concomitants tels que l’hypertension. Cela dépend cependant de nombreux facteurs individuels.

Les apports journaliers en chlorure et en sodium sont-ils excessifs en Europe ? Dans quelle mesure doivent-ils être réduits ?

Des données du niveau d’excrétion du sodium dans l’urine, qui est un bon indicateur de la consommation de sodium, ont été collectées dans le cadre d’enquêtes de population conduites dans différents pays européens. Elles indiquent des niveaux moyens de consommations chez les adultes variant, selon les pays, de 3 à 6 g de sodium par jour pour les hommes, et de 2,5 à 4 g par jour pour les femmes et donc qui dépassent le niveau d’apport sûr et adéquat fixé pour le sodium. Le risque d’un apport inadéquat (insuffisant) dans les populations européennes est donc faible. La préoccupation porte plutôt sur une consommation excessive de sodium. Par conséquent, dans la pratique, la valeur proposée peut guider les autorités compétentes des Etats-Membres dans l’établissement d’objectifs de réduction de l’apport en sodium pour la population.

Comment ces avis scientifiques sur le chlorure et le sodium vont-ils être utilisés au niveau des décideurs européens ? Peuvent-ils pousser à une politique européenne de réduction du sel ?

Le cadre réglementaire européen qui a été développé à la suite de la série de crises alimentaires survenues à la fin des années 1990, a instauré un système européen de sécurité des aliments dans lequel les responsabilités des évaluateurs des risques et des gestionnaires des risques sont bien séparées. Comme évaluateur des risques, l’EFSA a pour rôle de fournir des avis scientifiques sur lesquels la Commission européenne et les Etats-Membres peuvent ensuite s’appuyer pour informer les politiques publiques en matière d’alimentation. Par ailleurs, au sein de l’UE, la santé publique relève par principe de la compétence des Etats-Membres. Dans ce domaine, chaque Gouvernement national établit ses propres politiques. Toutefois, la Commission mène des initiatives ayant pour but d’encourager une approche européenne intégrée en matière de promotion de la santé et de prévention. Dans ce cadre, la réduction du sel dans certains aliments est l’une de ses priorités d’action depuis de nombreuses années. Par exemple, la Commission coordonne au niveau européen des discussions avec les entreprises agroalimentaires concernant la reformulation des produits transformés pour réduire leur contenu en sel.  

Propos recueillis par Clarisse LEMAITRE, consultante FOODINNOV NUTRITION  

1 PROMETHEUS : https://www.efsa.europa.eu/en/interactive-pages/prometheus/prometheus

2 Consulter à ce sujet l’AVIS de l’Anses relatif à la caractérisation des dangers liés à l’utilisation des sels de potassium en substitution du chlorure de sodium dans l’alimentation pour des populations à risques (février 2020), disponible sur anses.fr

BON A SAVOIR

L’EFSA met à disposition du public (y compris professionnel) un outil interactif « Explorateur de VNR ». Cette plateforme permet d’accéder à l’ensemble des valeurs nutritionnelles de référence et de les trier par cible (âge, genre, état de grossesse ou d’allaitement) et/ou par nutriment. L’agence propose également un glossaire afin de se retrouver dans les différents sigles et terminologies utilisés (RNP, BNM, AS…). Pour accéder à la base de données, c’est ICI.

 

Avis EFSA en vigueur concernant les valeurs nutritionnelles de référence

(Pour accéder à l’avis, cliquer sur le nom du nutriment)

Nutriment Date de parution
Rapport global Décembre 2017 (mis à jour en septembre 2019)
Macronutriments
Énergie Janvier 2013
Glucides et fibres Mars 2010
Lipides Mars 2010
Protéines Février 2012
Eau Mars 2010
Minéraux
Calcium Mai 2015
Chlorure Septembre 2019
Chrome Octobre 2014
Cuivre Octobre 2015
Fer Octobre 2015
Fluorure Août 2013
Iode Mai 2014
Magnésium Juillet 2015
Manganèse Novembre 2013
Molybdène Août 2013
Phosphore Juillet 2015
Potassium Octobre 2016
Sélénium Octobre 2014
Sodium Septembre 2019
Zinc Octobre 2014
Vitamines
Acide pantothénique (vitamine B5) Février 2014
Biotine Février 2014
Choline Août 2016
Cobalamine (vitamine B12) Juillet 2015
Folates (vitamine B9) Novembre 2014
Niacine (vitamine B3) Juillet 2014
Riboflavine (vitamine B2) Août 2017
Thiamine (vitamine B1) Décembre 2016
Vitamine A Mars 2015
Vitamine B6 Juin 2016
Vitamine C Novembre 2013
Vitamine D Octobre 2016
Vitamine E en tant qu’α-tocophérol Juillet 2015
Vitamine K Mai 2017

 

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De la biologie à la médecine personnalisée. Mieux soigner demain ?

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Ces cinquante dernières années, l’humanité a connu sa plus grande révolution agricole, et les inquiétudes sur la santé et l’environnement sont grandissantes. Les consommateurs s’interrogent : Mangeons-nous trop de viande ? De poisson ? Peut-on rester en bonne santé en adoptant un régime vegan ? Doit-on l’explosion du nombre de cancers aux produits chimiques présents dans nos aliments ? Peut-on consommer bio et pas cher ? L’eau peut-elle un jour venir à manquer ? Aura-t-on demain de quoi nourrir 10 milliards d’êtres humains ? Mangerons-nous des algues et des insectes ?… Ce livre apporte des réponses claires et scientifiquement étayées à 50 questions essentielles sur l’agriculture et l’alimentation, car les consommateurs méritent d’avoir une vision claire et fiable de ce qui se passe dans leurs assiettes et dans les campagnes.  

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