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Dans le monde du sport (mais pas seulement), les corps cétoniques ont la cote. Il faut dire que les révélations de certaines équipes cyclistes du Tour de France en 2020, qui ont reconnu utiliser ces « mystérieuses » molécules depuis plusieurs années, ont renforcé l’intérêt pour les corps cétoniques. En réalité, l’organisme connaît bien les corps cétoniques, puisqu’il est capable de les synthétiser dans les situations de jeûne pour pallier au manque de glucides. Les corps cétoniques correspondent principalement au β-hydroxybutyrate (βHB) et à l’acétoacétate. Initialement, les scientifiques pensaient surtout que ces substrats étaient utilisés exclusivement par le cerveau pour produire de l’énergie, en lieu et place du glucose. Les travaux de recherche ont cependant montré que les tissus comme le muscle pouvaient eux aussi produire de l’énergie à partir des corps cétoniques. D’où l’intérêt pour le monde du sport.

Cet intérêt présuppose que les corps cétoniques soient d’excellents substrats pendant l’effort physique, comparativement au glucose et aux acides gras. De fait, toutes les études ne s’accordent pas sur un bénéfice des corps cétoniques. Le sujet est en effet complexe : certes, l’organisme peut puiser dans les corps cétoniques en cas de jeûne. Néanmoins, pendant l’effort sportif, la supplémentation en corps cétoniques ne correspond pas vraiment à une situation de jeûne. A supposer qu’il existe un bénéfice des corps cétoniques, deux hypothèses sont valables : soit les corps cétoniques sont en soi d’excellents substrats, soit la supplémentation en corps cétoniques force l’organisme à activer des voies métaboliques bien précises pour mieux répondre à l’effort physique, sans pour autant utiliser les corps cétoniques comme source d’énergie.

Dans cette étude, des chercheurs britanniques ont souhaité répondre à l’intégralité de ces questions. Pour cela, six cyclistes professionnels ont été soumis à un exercice physique, avec trois supplémentations différentes : consommation d’eau, supplémentation à faible dose en βHB, et supplémentation à forte dose en βHB. De nombreux paramètres ont été mesurés, et en particulier la contribution du βHB à la dépense énergétique totale des cyclistes.

De manière cohérente, la supplémentation à forte dose en βHB a bien conduit à des concentrations plasmatiques élevées en βHB, ainsi que dans les urines des cyclistes. Cette hausse de concentration en βHB ne s’est cependant pas traduite par une hausse des taux d’oxydation du βHB. Par ailleurs, les chercheurs ont pu mesurer que l’oxydation maximale du βHB était atteinte pour un exercice équivalent à 4,46% de la VO2max, ce qui est bien plus faible que des sources d’énergie plus classiques. Cependant, les résultats montrent qu’une hausse modérée, mais pas trop forte, de la concentration plasmatique en βHB améliore l’efficacité de l’exercice physique.

Ces résultats ne vont pas forcément dans le sens d’un bénéfice « magique » des corps cétoniques, qui ne contribuent finalement que faiblement à la dépense énergétique totale. On s’orienterait donc vers la seconde hypothèse, selon laquelle les corps cétoniques ne sont pas nécessairement utilisés par le muscle, mais « forcent » l’organisme à privilégier des voies métaboliques bien précises pour mieux répondre à l’exercice physique. Les chercheurs n’excluent pas non plus un rôle des fibres musculaires (plusieurs types de fibres existent), qui pourraient expliquer des différences inter-individuelles. En définitive, plus d’études de ce type sont attendues, pour lever le mystère sur la manière dont les corps cétoniques sont métabolisés durant l’exercice physique.

 

The Effect of Blood Ketone Concentration and Exercise Intensity on Exogenous Ketone Oxidation Rates in Athletes.

Article publié en août 2020 dans Medicine & Science in Sports & Exercise.

Lien (open access) : https://doi.org/10.1249/MSS.0000000000002502