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Les recherches se poursuivent concernant l’impact des édulcorants intenses sur la santé humaine. Bien que les édulcorants soient censés remplacer le goût sucré, avec les calories en moins (et donc théoriquement le pic glycémique et insulinémique en moins), la méfiance vis-à-vis de ces additifs s’est instaurée peu à peu au sein du grand public. Les recherches, et en particulier les données épidémiologiques, vont dans les deux sens : concernant les paramètres métaboliques, aussi bien des résultats positifs que des impacts négatifs sont mis en évidence. D’ailleurs, dans son avis de 2015 sur les édulcorants intenses, l’Anses avait été incapable de trancher sur les édulcorants intenses, et soulignait la nécessité de plus amples travaux. Depuis, les recherches se sont focalisées sur un éventuel impact sur le microbiote intestinal : en 2014, l’étude de Suez et collaborateurs s’étaient focalisés sur la saccharine (E954), et avaient montré des modifications du microbiote intestinal en lien avec une hyperglycémie et une prise de poids chez des souris.

Ici, des chercheurs américains ont voulu en savoir plus sur le mode d’action de la saccharine, en faisant l’hypothèse de retomber sur des résultats similaires à ceux de Suez et collaborateurs. Deux expériences ont été réalisées : la première clinique, et la seconde in vivo.

Pour l’expérience clinique randomisée en double aveugle, une quarantaine de volontaires ont été répartis en quatre groupes : placebo, saccharine, placebo + lactisole (un inhibiteur des récepteurs au goût sucré, STR, présents dans l’intestin), et saccharine + lactisole. La dose quotidienne de saccharine donnée aux volontaires correspondait à la Dose Journalière Admissible définie par le Jecfa (à savoir 5 mg/kg poids corporel/jour). Pour ce qui est de la lactisole, son utilisation correspond à une hypothèse des chercheurs selon laquelle les effets du E954 seraient médiés par les STR. Dans chaque cas, la supplémentation a duré deux semaines. Au bout du compte, la supplémentation en E954 n’a altéré aucun paramètre circulant (glycémie, insulinémie, glucagon, GLP-1). De la même manière, l’analyse des matières fécales n’ont pas révélé de changement significatif en termes de composition bactérienne.

La seconde expérience a quant à elle porté sur des souris. L’objectif était double : visualiser plus précisément l’impact du récepteur STR dans les effets physiologiques de la saccharine, mais aussi et surtout avoir une approche de plus long terme avec des rongeurs. Le design expérimental a donc été identique à celui de l’expérience clinique, avec les quatre groupes, et cette fois une supplémentation de 11 semaines (qui ne sont pas équivalentes à 11 semaines chez l’Homme). Et, de la même manière que les résultats cliniques, les résultats in vivo ne montrent aucune altération ni des paramètres métaboliques ni de la composition du microbiote intestinal, suivant une supplémentation en E954.

Ces résultats contredisent donc l’étude de Suez et collaborateurs, qui avait fait beaucoup de bruit parce que des impacts négatifs avaient été mis en évidence. En réalité, ces résultats sont surtout en accord avec d’autres études cliniques, bien moins médiatisées et qui n’avaient pas non plus mis en évidence d’effets négatifs de la saccharine sur les paramètres métaboliques. Cela dit, les auteurs n’excluent pas une durée trop courte pour l’étude clinique (2 semaines), qui ne permet pas de visualiser d’éventuels effets de long terme du E954.

 

High-dose saccharin supplementation does not induce gut microbiota changes or glucose intolerance in healthy humans and mice.

Article publié dans Microbiome le 12 janvier 2021.

Lien (open access) : https://doi.org/10.1186/s40168-020-00976-w