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Les autorités de santé, comme l’EFSA, recommandent de consommer du poisson deux fois par semaine. Ces aliments sont riches en acides gras polyinsaturés oméga-3, associés à une diminution du risque de développer certaines pathologies. Cependant, plusieurs études ont montré que la relation entre consommation de poisson et mortalité suit une courbe en U. Ce phénomène pourrait s’expliquer par la présence de contaminants environnementaux ou chimiques.

Les objectifs de cette étude étaient d’estimer :

  • L’association entre la consommation de poisson et la mortalité,
  • L’association entre l’apport en acides gras polyinsaturés oméga-3 et la mortalité,
  • L’effet direct du poisson sur la mortalité en ajustant l’exposition alimentaire aux contaminants (polluants organiques persistants).

Pour cela, les auteurs se sont appuyés sur la cohorte française E3N (étude épidémiologique auprès de femmes de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale) qui comprenait près de 100 000 femmes agées de 40 à 65 ans. Pour cette analyse, 72 238 personnes, correspondant aux critères d’inclusion et d’exclusion, ont été retenues.

Les principales causes de mortalité analysées étaient les maladies cardiovasculaires, les cancers (tout type confondu, du sein, du poumon, colorectal) ainsi que la mortalité toutes causes confondues. La consommation alimentaire de poissons (maigres et gras) et d’oméga-3 (EPA, DHA, DPA) des sujets a été estimée par des questionnaires distribués en 1993. L’exposition aux polluants a été estimée via l’utilisation d’une base de données créée par l’Anses sur des produits disponibles sur le marché entre 2007 et 2009. Pour cette analyse, les auteurs se sont concentrés sur les polluants organiques persistants tels que les polychlorobiphényles, les dioxines, et les polybromodiphényléthers.

En moyenne, les participantes ont été suivies pendant 19 ans. Pendant ce suivi, 6 441 femmes sont décédées, dont 896 d’une maladie cardiovasculaire et 3 473 de cancers. L’apport moyen en poissons était de 20,4 g/jour pour les poissons maigres et de 13,5 g/jour pour les poissons gras. L’apport moyen en oméga-3 était de 501,5 mg/jour et les apports moyens en DHA, EPA et DPA étaient, respectivement, de 284,9, 151,1 et 65,5 mg/jour. À noter que la déviation standard était assez importante pour l’apport en oméga-3.

Il existait une association en forme de U entre la consommation de poisson et la mortalité toutes causes confondues. Ainsi, la consommation de poisson était bénéfique jusqu’à 40 g/jour puis une inversion de la courbe apparaissait. Pour les maladies cardiovasculaires et le cancer en général, l’association n’était pas linéaire et non-significative alors que pour les cancers du sein et colorectal, l’association était linéaire mais non significative. Pour le cancer du poumon, l’association avec la consommation de poisson était non linéaire et significative.

Pour les poissons maigres, l’association était non linéaire avec la mortalité en général et montrait une réduction du risque pour une consommation allant jusqu’à 18 g/jour, suivie d’un plateau. Concernant les poissons gras, des associations significatives ont été mises en évidence pour les cancers (non-linéaire) et le cancer du sein (linéaire). Pour les deux types de poissons, les associations étaient non significatives pour les autres causes de mortalité. L’association entre l’apport en oméga-3 et le risque de mortalité toutes causes confondues était significative, linéaire et positive pour le cancer du sein. Quand les apports en polluants organiques persistants étaient ajoutés dans le modèle, il n’y avait aucune modification des résultats présentés ci-dessus.

En conclusion, cette étude montre que la consommation de poisson en grande quantité, et notamment de poissons maigres, n’est pas nécessairement bénéfique pour la santé et que cela ne semblerait pas être dû aux polluants organiques persistants. Les auteurs n’excluent pas que l’augmentation du risque de mortalité associée à une consommation élevée de poissons, est liée aux métaux lourds, à d’autres substances contaminantes ou aux procédés de préparation et cuisson des poissons.

Les auteurs ont aussi listé les limites de cette étude, à commencer par le fait que la cohorte comportait uniquement des femmes travaillant dans l’éducation nationale et n’était donc pas représentative de la population française. De plus, le design de l’étude ne permet pas de prendre en compte les changements de consommation alimentaire, tout comme il ne prend pas en compte les méthodes de cuisson des poissons.

 

« Association between fish consumption and mortality in the E3N French women’s cohort »

Article publié le 30 octobre 2024 dans Frontiers in Nutrition

Lien (article en accès libre) : doi.org/10.3389/fnut.2024.1462710

Photo d’illustration issue de la banque d’images Pexels. Crédit : Mali Maeder