Temps estimé - 8 min
organisé par BIO ECONOMY FOR CHANGE
Protéines alternatives et ingrédients alimentaires – 2 Juin 2022
Présentation de Bio Economy for change
Bioeconomy For Change est le réseau de référence de la bioéconomie en France, en Europe et à l’international. Il rassemble 500 adhérents, depuis l’amont agricole jusqu’à la mise sur le marché de produits finis. Catalyseur de l’innovation dans le secteur de la bioéconomie, Bioeconomy For Change a véritablement oeuvré, en dix ans, à faire de la France un des leaders mondiaux dans le domaine de la valorisation des ressources renouvelables.
Contexte : les différents types de fermentation
La notion de fermentation regroupe 3 types de fermentation selon l’objectif :
- La fermentation traditionnelle qui consiste à « transformer » une(des) matière(s) première(s) en un produit par l’action des microorganismes, : c’est le cas des yaourts, du fromage, du vin, de la bière, …
- La fermentation de biomasse pour laquelle on utilise la faculté des microorganismes à se multiplier rapidement pour produire une biomasse riche en protéines
- La fermentation de précision qui va aussi utiliser cette capacité de croissance rapide des microorganismes pour leur faire produire une molécule ciblée en grande quantité.
Dans le cadre de la recherche de protéines alternatives, la fermentation de biomasse et la fermentation de précision sont étudiées.
Retour sur les 3 grandes sessions de cette journée Tech Day Fermentation
L’objet des échanges de la journée était « La fermentation au service des protéines alternatives et des ingrédients alimentaires. »
Après une introduction du sujet et des principaux acteurs du secteur par Louis Tiers, différents intervenants sont venus présenter leurs technologies et leurs expériences :
-
La fermentation au service des protéines
- METEX : productions d’acides aminés par fermentation
- Lesaffre : production, par fermentation, d’une protéine de levure (Springer Proteissimo™ 101, commercialisée depuis fin 2020) pour enrichir les aliments en protéines de bonne qualité sur le plan organoleptique et nutritionnel
- Lanzatech : fermentation à partir de CO2 et de gaz d’industrie
-
Process et outils au service de la fermentation:
- Abolis : biologie de synthèse, développement de souches et scale up
- TWB : méthodologies analytiques pour le suivi des fermentations
- Syngulon : biologie de synthèse, contrôle de la dérive génétique en fermentation par bactériocines
- Ingredia : étude de la production d’un peptide d’intérêt à partir du lait, par fermentation de précision
- Metgen : production d’enzymes par fermentation de précision, élargissement à la production de protéines
-
La fermentation de précision pour la production de protéines et ingrédients fonctionnels
- Remilk : production de protéines laitières (dont une protéine de lactosérum en particulier) pour la production de produits laitiers sans lait. Une création d’usine est en cours avec d’importantes capacités de production prévues
- Puratos : productions d’enzymes utilisées en panification, comme auxiliaire technologique, par fermentation de précision
- Protera : biologie de synthèse, développement de souches d’intérêt, accompagnement des entreprises du choix de la protéine à sa production à grande échelle par fermentation de précision
- Groupe Bel : étude des procédés de fermentation contrôlées pour la production de protéines alternatives, mais malgré les avancées sur le sujet, constat d’une incapacité des fournisseurs à fournir des quantités conséquentes pour des essais réels
- Standing Ovation : souhait de faire un fromage sans matière première animale à partir de caséine obtenue par fermentation, combinée à des matières premières végétales. Aujourd’hui production de caséine à l’échelle du kilogramme.
- Fermentalg : production d’un colorant bleu résistant au pH par culture de microalgues. Le coproduit est également intéressant car très riche en protéines. Une commercialisation est prévue fin 2023
Les freins actuels pour un déploiement de la fermentation de précision à plus grande échelle
Nombreux sont les projets sur ce sujet de la fermentation de précision. De nombreux acteurs sont capables d’accompagner les industriels dans le développement de souches productrices de leur molécule d’intérêt (recherche de protéine d’intérêt, recherche de l’hôte, modification génétique) et les conditions de leur production à l’échelle industrielle.
Cependant, les freins restent nombreux pour une application réaliste à grande échelle :
- Réglementaires : statut novel food et OGM
- Humains : les consommateurs ne sont pas tous prêts à consommer du « lait de microbes » !
- Techniques : la production nécessite des équipements conséquents pour une production grande échelle et les acteurs sont peu nombreux à posséder de tels outils
Il faut noter également que la fermentation est un procédé couteux notamment en énergie. Afin d’être rentables les industriels doivent aujourd’hui s’orienter vers la production de molécules à haute valeur ajoutée.
D’autre part, le bénéfice environnemental face à des protéines animales et végétales a été remis en cause plusieurs fois et malgré qu’il soit utilisé comme argument par certains acteurs des protéines fermentaires, il ne semble pas si évident.
En conclusion, il y a beaucoup de monde sur le sujet mais il y a encore beaucoup de freins pour que ce soit la source de protéine de demain… mais pourquoi pas celle d’après demain !
Guenaelle Diler est Chef de Projets Scientifique chez Foodinnov. Docteur en Sciences des Aliments, elle est en charge notamment des projets collaboratifs chez Foodinnov.