Temps estimé - 9 min
Dans un contexte où les consommateurs recherchent des produits plus durables et plus responsables, les allégations environnementales sont devenues un levier marketing clé pour les industriels. Elles sont néanmoins parfois source de confusion pour les consommateurs. Ces allégations sont alors aujourd’hui dans le viseur des autorités françaises et européennes : elles luttent contre les pratiques de greenwashing en travaillent sur le cadre règlementaire, pour renforcer la transparence et encadrer les communications.
Une première étape à l’échelle européenne : la Directive « anti-greenwashing »
La directive (UE) 2024/825, publiée en février 2024, a marqué un tournant. Son objectif : donner aux consommateurs les moyens d’agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et grâce à une meilleure information. Appelée « Directive anti-greenwashing », elle a introduit une définition claire des allégations environnementales, et interdit plusieurs pratiques considérées comme trompeuses, comme par exemple :
- Les allégations vagues et génériques (« écologique », « respectueux de la nature », « biodégradable », etc.) si elles ne reposent pas sur une performance environnementale reconnue,
- Les allégations globales trompeuses, attribuées à un produit ou à une entreprise dans son ensemble alors qu’elles ne concernent qu’un aspect partiel,
- Les promesses futures non étayées (neutralité carbone, climat…), sans plan clair, mesurable et vérifiable,
- Les allégations qui soutiennent qu’un produit a un impact neutre, réduit ou positif sur l’environnement, sur la base de compensation des émissions de gaz à effet de serre,
- Les labels de développement durable qui ne sont pas fondés sur un système de certification ou qui n’ont pas été mis en place par les autorités publiques.
Les États membres doivent transposer cette Directive en droit national d’ici mars 2026, avec une application prévue d’ici septembre 2026.
La France avait pris de l’avance sur cette Directive européenne « anti-greenwashing », avec le Décret n° 2022-748, qui interdit déjà l’usage de certaines mentions comme « biodégradable » ou « respectueux de l’environnement ». D’ailleurs, en mai 2024, le Conseil d’État a confirmé la légalité de ce décret, malgré les contestations de certaines fédérations professionnelles, qui ont alors été rejetées. En effet, la haute juridiction a considéré que l’interdiction poursuivait un objectif légitime de protection de l’environnement et ne constituait pas une entrave disproportionnée au marché intérieur. Cette décision ancre alors durablement l’interdiction des allégations vagues dans le droit français, et renforce ainsi la solidité du cadre national en attendant la transposition de cette Directive « anti-greenwashing ».
La directive « Green Claims » : un projet européen à l’arrêt
Présentée en mars 2023, la proposition de Directive sur les allégations environnementales visait à harmoniser les règles au sein de l’UE, avec des exigences fortes :
- preuves scientifiques vérifiables pour toute allégation,
- vérification indépendante,
- encadrement strict des labels environnementaux,
- sanctions harmonisées en cas de manquements.
L’objectif était d’éviter la fragmentation réglementaire entre États membres et de restaurer la confiance des consommateurs.
Alors qu’une phase de négociation interinstitutionnelle était prévue en juin 2025 entre le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne (qui avaient adopté leur position respective sur ce projet de Directive en juin 2024), elle a été annulée quelques jours après l’annonce d’un porte-parole de la Commission européenne de son intention de retirer le texte si les micro-entreprises n’étaient pas exemptées des obligations prévues par cette Directive. Le débat se cristallise également sur la lourdeur des procédures, jugées trop coûteuses par une partie des acteurs politiques.
Depuis, aucune date n’a été fixée pour reprendre les discussions. Pour rappel, la publication de cette Directive était initialement prévue pour fin 2025, et la transposition en droit national par les Etats membres était quant à elle prévue sous un délai de 18 mois, soit une entrée en vigueur initialement envisagée courant 2027. Le texte est alors en suspens à ce jour ; il n’est pas officiellement retiré, mais il est politiquement en perte de vitesse, sans calendrier clair concernant la reprise des échanges interinstitutionnels. Dans un contexte de changement de présidence du Conseil de l’Union européenne (la Pologne a cédé sa place au Danemark le 1er juillet 2025), il y a fort à parier que les discussions vont durer encore quelques temps.
Quelle situation à date pour les entreprises ?
En clair, à ce jour, en France, l’interdiction des mentions vagues s’applique pleinement ; et à l’échelle de l’UE, la Directive 2024/825 est adoptée et devra être intégrée dans les pratiques d’ici 2026 après la transposition en droit national. La directive « Green Claims », elle, reste incertaine, laissant planer une hétérogénéité réglementaire entre États membres.
La vigilance est donc de mise pour les entreprises, qui doivent déjà sécuriser leurs allégations à la lumière des règles françaises et anticiper les interdictions européennes qui se profilent à l’horizon 2026.
À court terme, la prudence s’impose : toute communication environnementale doit être spécifique, précise, vérifiable et documentée, pour éviter des sanctions et préserver la confiance des consommateurs.
Image d’illustration de l’article générée par l’IA (ChatGPT)
Sources :
Conseil d’État, 6ème – 5ème chambres réunies, 31/05/2024, 464945, Inédit au recueil Lebon
« Allégations environnementales utilisées sur les emballages : le Conseil d’État rappelle les critères permettant de juger la légalité des mesures nationales au regard du droit de l’UE », 6 JUIN 2024 – Pauline Philippon, Lamyline.
La Commission abandonne son projet de loi anti-greenwashing avant les négociations finales, Nikolaus J. Kurmayer, EURACTIV.com, 20/06/2025
Chez FOODINNOV, nous pouvons vous aider à sécuriser vos allégations environnementales. Vous avez besoin d’accompagnement pour la vérification réglementaire de vos allégations sur vos supports commerciaux ou étiquetages produits ?