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Dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2025, le sujet de la mise en place d’une taxe sur les produits sucrés a fait la une des actualités dernièrement et a suscité de vives discussions, ponctuées de quelques rebondissements. La situation vous semble floue ? Voici ce qu’il faut retenir.
Le parcours du projet de loi
Pour rappel, un texte de loi est d’abord proposé par le Gouvernement (projet de loi) ou par un député (proposition de loi) : ici, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2025 (n°325) a été déposé à l’Assemblée Nationale le 10 octobre dernier par 2 Ministres (Mme Geneviève DARRIEUSSECQ, Ministre de la santé et de l’accès aux soins et M. Laurent SAINT-MARTIN, Ministre chargé du budget et des comptes publics).
Comme le veut la procédure, il a ensuite été déposé à l’Assemblée nationale et transmis à la commission compétente sur le sujet : ici la Commission des Affaires Sociales, et la Commission des Finances ont été saisies le 10 octobre.
En commission, les députés ont fait évoluer le texte en adoptant des amendements (modifications, ajouts ou suppressions d’articles) : les travaux de commission ont été publiés le 25 octobre.
- Rapport n° 487, tome I ; Rapport n° 487, tome II et Rapport n° 487, tome III publiés au nom de la Commission des affaires sociales.
- Avis n° 480, fait au nom de la Commission des finances.
Entre le 28 octobre et le 5 novembre, l’Assemblée nationale a fait une « Première lecture du projet de loi » : au programme, discussions et débats en séance publique et vote des amendements. A noter que de nombreux amendements ont été publiés entre le 11 octobre et le 5 novembre, et ont été examinés par la Commission des affaires sociales (1603) ; par la Commission des finances (300) ; par l’Assemblée nationale (2375).
Le 6 novembre, le texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale a été publié, et a été transmis au Sénat. Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 novembre pour une première lecture (Texte n° 129 (2024-2025)), le texte a déjà fait l’objet d’un avis de la Commission des finances le 12 novembre dernier (Avis n° 130 (2024-2025) et d’un rapport de la Commission des Affaires sociales (Rapport n° 138 (2024-2025), Tome I et Tome II) le 13 novembre.
A noter qu’à date (18/11), 1334 amendements et 2 motions ont déjà été déposés sur ce texte n° 129. Une discussion en séance publique au Sénat est prévue les 18, 19, 20, 21, 22 novembre (et possiblement les 23 et 26 novembre également). Si les sénateurs ne font pas évoluer le texte, alors après un vote « conforme » du Sénat, le texte est définitivement adopté ; si par contre les sénateurs le modifient, il repartira à l’Assemblée nationale (c’est la navette parlementaire).
En cas de désaccord entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le Gouvernement provoquera la réunion d’une commission mixte paritaire afin de trouver un compromis sur les articles faisant l’objet de discussions. Si cette conciliation échoue, c’est le Gouvernement qui donnera le dernier mot à l’Assemblée nationale.
Qu’en est-il concrètement des propositions liées à la taxation des produits sucrés ?
La modification de la « Taxe Soda » adoptée par l’Assemblée nationale :
Pour rappel, en France, une taxe appelée « taxe soda » a été mise en place en 2012, via la Loi de Finances. L’objectif est à la fois de limiter la quantité de sucre dans les boissons contenant des sucres ajoutés et d’inciter les Français à réduire leur consommation de soda. Cette taxe avait par la suite été étendue aux boissons édulcorées, puis elle a été modifiée en 2018 par la Loi n° 2017-1836, pour devenir proportionnelle à la teneur en sucre dans les boissons. Le Code général des impôts (Article 1613ter) avait été modifié en conséquence. Cet article 1613ter s’applique aux boissons et préparations liquides pour boissons contenant des sucres ajoutés ou des édulcorants de synthèse, quelle qu’en soit la quantité, qui relèvent des codes NC 2009 (jus de fruits ou de légumes) et NC 2202 (eaux minérales et gazéifiées additionnées de sucres ou d’autres édulcorants) du tarif des douanes, qui sont conditionnées dans un récipient destiné à la vente au détail (bouteille, brique, fût, canette, bocal, notamment), et qui sont vendues directement en France au consommateur ou par l’intermédiaire d’un professionnel (restaurant, débit de boissons par exemple). A noter que lorsque le produit contient à la fois des sucres ajoutés et des édulcorants, alors la vente est soumise aux 2 taxes.
Parmi les amendements adoptés par l’Assemblée nationale dans le cadre de ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2025, l’un concerne la réforme de cette taxe soda. En effet, le 4 novembre dernier, après un rejet en séance publique en raison de l’opposition de certains députés, un amendement du projet de loi pour réformer cette taxe soda a finalement été adopté par les députés lors d’une seconde délibération (142 voix pour vs 100 contre). Il a d’ailleurs été soutenu par la Ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq. Cet amendement prévoit la création de 3 tranches d’imposition (au lieu de 16 actuellement), et la tarification a été revue à la hausse :
- Pour les boissons contenant moins de 5 kg de sucre ajouté par hectolitre : taxe de 3,50 € /hl
- Pour les boissons contenant entre 5 et 8 kg de sucre ajouté par hectolitre : taxe de 21 €/hl
- Pour les boissons contenant plus de 8 kg de sucre ajouté par hectolitre : taxe de 28 €/hl.
A noter qu’il s’inspire du modèle britannique adopté il y a quelques années qui définit également 3 catégories de produits pour la taxation.
Le verdict du Sénat est attendu d’ici le 22 novembre.
Rebondissements sur la proposition de taxe sur les produits sucrés transformés :
Un amendement du projet de loi visant à instaurer une taxe sur les sucres ajoutés dans les produits alimentaires transformés a également été adopté par l’Assemblée nationale le 4 novembre dernier (79 voix pour vs 69 voix contre). Un sous-amendement proposant une tarification plus élevée que celle proposée dans cet amendement a aussi été adopté.
Concrètement, ces amendements concernent les produits alimentaires transformés contenant des sucres ajoutés (boissons exclues puisqu’elles font déjà l’objet d’une fiscalité spécifique comme évoqué ci-dessus) et proposent la création de 4 tranches d’imposition :
- Pour les produits contenant moins de 5 kg de sucres ajoutés par quintal de produit transformé : pas de taxation ;
- Pour les produits contenant entre 5 et 10 kg de sucres ajoutés par quintal de produit transformé : taxe de 21 €/quintal de produit ;
- Pour les produits contenant entre 10 et 15 kg de sucres ajoutés par quintal de produit transformé : taxe de 28 €/quintal de produit.
- Pour les produits contenant plus de 15 kg de sucres ajoutés par quintal de produit transformé : le tarif applicable par kg supplémentaire est fixé à 2,21 €/quintal de produit.
Bien qu’ils aient été intégrés dans le texte résultant des délibérations de l’Assemblée nationale publié le 6 novembre sous l’« Article 9 quinquies (nouveau) », ces amendements ne figurent plus dans le texte (n°129) transmis au Sénat. La raison ? Les délibérations à l’Assemblée nationale en première lecture doivent se faire dans un délai de 20 jours après le dépôt du projet de loi. Ce délai ayant été dépassé, la procédure encadrée par l’article 47-1 de la Constitution a été appliquée : le gouvernement a envoyé une version partielle du texte au Sénat en choisissant les amendements à conserver en fonction des priorités jugées stratégiques. L’adoption de ces amendements s’étant faite sans le soutien de l’exécutif, il n’est donc pas surprenant qu’ils aient disparu du projet de loi transmis au Sénat.
A noter sur ce point que la Ministre de la santé et de l’accès aux soins avait indiqué fin octobre (après avoir d’abord été favorable à l’instauration d’une telle taxe) vouloir convaincre les industriels d’aller vers des recettes utilisant beaucoup moins de sucres, plutôt que de créer une nouvelle taxe.
Sources :
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, Assemblée nationale.
Financement de la sécurité sociale pour 2025, Texte n° 129 (2024-2025) transmis en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution le 8 novembre 2024, Sénat, consulté le 18/11/2024.
Dossier législatif sur le Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, Sénat, consulté le 18/11/2024.
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