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Avis de turbulences pour les formules infantiles. Récemment, une série d’articles publiées dans le prestigieux Lancet pointait du doigt le rôle des groupes agroalimentaires dans la mise en avant des formules infantiles, au détriment de l’allaitement maternel. Cette fois, dans le non moins réputé British Medical Journal (BMJ), c’est une équipe de recherche multinationale qui souligne la présence d’allégations nutritionnelles et de santé sur les packagings des formules infantiles, allégations trop peu étayées selon cette équipe de recherche.
L’étude a porté sur les formules infantiles présentes dans 15 pays du monde : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie Saoudite, Australie, Canada, Espagne, Etats-Unis, Inde, Italie, Japon, Nigeria, Norvège, Pakistan, Royaume-Uni et Russie. Dans chaque pays, les formules infantiles disponibles ont été répertoriées, puis les différentes allégations listées. Pour vérifier les preuves de ces allégations, les chercheurs ont collecté, directement auprès des entreprises agroalimentaires, les données scientifiques disponibles ; ces données ont ensuite été analysées en termes de qualité de résultats, et de risques de biais, selon des critères scientifiques largement reconnus.
Au total, cette étude se sera focalisée sur 757 formules infantiles à travers les 15 pays étudiés. Sur ces 757 produits, 608 comportent au moins une allégation (nutritionnelle et/ou de santé). Ces allégations concernent essentiellement les acides gras poly-insaturés à chaîne longue (a priori les oméga-3 à chaîne longue ; 46% des formules), puis le trio prébiotiques/probiotiques/synbiotiques (37% des produits), er enfin les hydrolysats de protéines (37% des produits). En ce qui concerne les preuves associées à ces allégations, les chercheurs ont constaté que seuls 26% des formules ayant au moins une allégation avaient des preuves scientifiques associées : preuves dont la majorité sont des études cliniques (données spécifiques), suivies par des revues systématiques de la littérature scientifique (données non spécifiques). Sur les 134 études cliniques identifiées, seules 27 étaient effectivement des études randomisées contrôlées, considérées comme le plus fort niveau de preuve scientifique. Cependant, qu’il s’agisse de ces meilleurs essais cliniques, ou de revues systématiques de la littérature scientifique, les chercheurs ont constaté que le risque de biais était élevé, selon les critères Cochrane.
Les résultats sont donc de deux ordres : quantitatifs, et qualitatifs. Sur le plan quantitatif, le score de 26% peut être considéré comme un mauvais score, surtout compte tenu du rôle fondamental des formules infantiles à moment déterminant de la vie. La dimension qualitative est reliée à la qualité des études cliniques et des revues systématiques de la littérature, lorsqu’elles existent : s’il est vrai qu’il existe une faible part d’essais cliniques randomisés contrôlés, la plupart de ces essais ont été pénalisés, parce que financées par les industries agroalimentaires et/ou du fait de la présence d’au moins un auteur affilié à ces industries. De ce point de vue, il convient aussi de noter que l’étude n’est pas rentrée dans le détails des essais cliniques randomisés contrôlés.
Soulignons également qu’entre les différents pays étudiés, les règlementations (et donc les exigences scientifiques associées) ne sont pas homogènes. Cependant, l’article n’a pas étudié le lien entre le pays de commercialisation des formules, et les dimensions quantitatives/qualitatives évoquées plus haut.
Health and nutrition claims for infant formula: international cross sectional survey.
Article publié le 15 février 2023 dans The BMJ.
Lien (open access) : https://doi.org/10.1136/bmj-2022-071075
Lire également l’éditorial associé à cet article.
Poorly substantiated health claims on infant formula.
Editorial publié le 15 février 2023 dans The BMJ.
Lien (open access) : https://doi.org/10.1136/bmj.p310