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Dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (PLFSS-2026), l’Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements visant à rendre obligatoire l’apposition du Nutri-Score sur les produits alimentaires, lors de la séance du 7 novembre 2025. Cette évolution législative, si elle est confirmée, représente un tournant majeur pour le secteur agroalimentaire. Voici ci-dessous ce qu’il faut retenir de la situation à date.
Les amendements adoptés
L’amendement n° 508 (ainsi que son « dupliqué » n° 1801) vise à introduire, dans un nouvel article du PLFSS (11 ter), une obligation d’affichage du Nutri-Score. D’une part cet amendement modifierait l’article L. 3232-8 du Code de la santé publique en introduisant cette obligation (par le remplacement des termes « peut être accompagnée » par « s’accompagne ») tout en exemptant les produits bénéficiant de signes nationaux ou européens de qualité :
« Afin de faciliter le choix du consommateur au regard de l’apport en énergie et en nutriments à son régime alimentaire, sans préjudice des articles 9,16 et 30 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, […] à l’exception des produits bénéficiant d’un signe national ou européen de qualité dont la liste est définie par décret, la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le même règlement s’accompagne d’une présentation ou d’une expression complémentaire au moyen de graphiques ou de symboles, dans les conditions prévues à l’article 35 dudit règlement. »
Autrement dit : le NutriScore qui était facultatif deviendrait donc la règle. Par ailleurs, le sous-amendement n° 2585, qui a également été adopté, précise une exception à cette obligation : les produits bénéficiant d’un signe officiel de qualité (signe national ou européen) – tel que l’AOP, l’AOC, l’IGP, le Label Rouge, etc. – seront exclus de l’obligation d’apposer le Nutri-Score, leur liste devant être fixée par décret. Certains députés considèrent que sans cette exception, les produits de terroir français qui bénéficient d’un signe de qualité officiel, et dont le cahier des charges ne permet pas une reformulation destinée à optimiser la notation Nutri-Score, seraient pénalisés. Ils soulignent dans leur exposé qu’il leur semble « essentiel de protéger ces produits de terroir et de ne pas introduire une discrimination paradoxale à l’encontre de ceux-ci, alors même que les signes de qualité ont précisément pour objet d’identifier et de valoriser leurs caractéristiques particulières, leur ancrage territorial et leur mode de production ».
D’autre part, l’amendement 508 modifierait le Code général des impôts en introduisant une contribution (5%) sur le chiffre d’affaires (HT) des metteurs sur le marché de produits qui n’afficheraient pas cette présentation/expression complémentaire à la déclaration nutritionnelle (le Nutri-Score), à l’exception de ceux commercialisant les produits bénéficiant des signes officiels de qualité :
« Les metteurs sur le marché de produits entrant dans le champ d’application du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires […] sont assujettis à une contribution assise sur le chiffre d’affaires hors taxes. Son taux est de 5 %.»
« Les metteurs sur le marché de produits bénéficiant d’un des signes nationaux ou européens de qualité dont la liste est définie par décret ne sont pas assujettis à cette contribution. »
« Le produit de cette contribution est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie. »
« La contribution prévue […] n’est pas due lorsque l’entreprise respecte les obligations prévues à l’article L. 3232-8 du code de la santé publique. »
Enjeux, effets, et prochaines étapes
Un premier enjeu à souligner est celui de la lisibilité et de l’acceptation du logo auprès des consommateurs : le Nutri-Score est déjà largement plébiscité (94 % des Français seraient favorables à son obligation selon l’exposé sommaire de l’amendement 508).
Pour les professionnels de l’agroalimentaire, il y a un double effet à anticiper : d’une part l’impact commercial (un score peu favorable pourra peser sur les ventes), d’autre part l’impact opérationnel (besoin de réviser formulation, packaging, positionnement, communication).
En amont, cela exige une cartographie des produits existants : quels scores auraient-ils aujourd’hui ? Quels volumes représentent-ils ? Quels seraient les coûts et bénéfices d’une reformulation ?
Il reste à rappeler que cette mesure soulève des questions de conformité réglementaire européenne : la ministre de la Santé a d’ores et déjà exprimé des réserves, estimant que l’amendement « contrevient au droit de l’Union européenne ».
Dans tous les cas, à date le texte n’est pas encore adopté puisqu’il est actuellement en première lecture au Sénat. Pour rappel, l’adoption d’un texte n’a lieu que s’il y a accord entre l’Assemblée nationale et le Sénat (navette parlementaire); en cas de désaccord persistant, le Gouvernement donnera le dernier mot à l’Assemblée nationale.
Sources :
Texte résultant des délibérations de l’Assemblée Nationale, 13/11/2025
Amendement 508, déposé le 29/10/2025.
Amendement 1801, déposé le 31/10/2025.
Sous amendement 2585, déposé le 05/11/2025.