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Les aliments ultra-transformés (AUT) sont associés à des risques sanitaires par de nombreuses études (obésité, maladies cardio-métaboliques, certains cancers). Leur empreinte environnementale et leur impact sur la biodiversité alimentaire sont toutefois moins documentés, alors que ces produits s’appuient souvent sur des matières premières standardisées (maïs, blé, soja) et des procédés énergivores. Une analyse menée dans la cohorte européenne EPIC quantifie ces liens à grande échelle, en examinant l’empreinte carbone, l’occupation des sols et la diversité spécifique des régimes.
L’étude évalue, chez près de 370 000 adultes européens (10 pays, recrutés entre 1991 et 2000), l’association entre le niveau de transformation des aliments (classification NOVA) et trois indicateurs : émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’alimentation, utilisation des terres et biodiversité. Les auteurs testent aussi des scénarios de substitution des AUT par des aliments non ou peu transformés (NOVA 1), en raisonnant soit à poids constant (g/j), soit à énergie constante (kcal/j). Les apports habituels (sur 12 mois) ont été recueillis via des questionnaires validés et harmonisés. La part des NOVA 1–4 a été calculée en g/j et kcal/j. Les GES (kg CO₂eq/j) et l’occupation des sols (m²/j) proviennent de la base SHARP (ACV couvrant production, emballage, transport, préparation). La biodiversité alimentaire est mesurée par la Dietary Species Richness (DSR), nombre d’espèces consommées sur l’année (aliments, repas mixtes et boissons inclus).

En moyenne, les participants consommaient 364 g/j d’AUT, soit 12,9 % de l’apport alimentaire total en poids et 30,5 % en énergie. Les GES étaient à 5,3 kg CO₂eq/j, et l’utilisation des terres à 6,9 m²/j. L’indice de diversité alimentaire était à 68 espèces/an.
À kcal constantes, l’augmentation d’un écart-type d’AUT de chaque classe NOVA était associé à un plus haut niveau d’utilisations des terres, d’émissions de GES, et de DSR. Ainsi pour NOVA4, cela représentait +15,8 % de GES et +16,9 % de terres (contre +13,8 % et +12,8 % pour les NOVA 1). Des effets similaires étaient visibles quand l’exposition était exprimée en g/j. Les AUT d’origine animale portaient les associations les plus fortes.
Concernant les substitutions, à poids constant, remplacer 10 % de l’apport (moyen) en AUT par des NOVA 1 était associé à une diminution de 8,9 % des émissions de GES et de 9,3 % de l’utilisation des terres. Le DSR était quasiment inchangé (–0,1 %). A énergie constante, la même substitution était associée à une augmentation de 2,6 % des GES , de 1,2 % des surfaces utilisées, et de 1,0 % de DSR, en raison des plus grandes quantités nécessaires pour atteindre l’isocalorie avec des aliments moins denses énergétiquement.
Les différences de DSR restaient marginales quels que soient les scénarios, suggérant que le niveau de transformation agit peu sur la richesse spécifique des régimes au niveau individuel.
→ En conclusion, dans cette cohorte, une consommation plus élevée d’aliments ultra-transformés était plus fortement associée aux GES et à l’occupation des sols que les aliments non ou peu transformés. L’effet sur la biodiversité alimentaire mesurée par la DSR était minime. Remplacer des AUT à poids constant réduirait nettement l’empreinte, mais à énergie constante l’impact pourrait augmenter du fait de la moindre densité énergétique des alternatives. Pour les stratégies de santé publique alliant climat et santé, cela plaide pour des substitutions pondérales et une réduction de la surconsommation énergétique associée aux AUT, avec une attention particulière aux AUT d’origine animale, plus impactants.
Les principales limites de cette étude sont : c’est une étude observationnelle sur une cohorte qui pourrait ne plus être totalement représentative de la population européenne actuelle ; les questionnaires ne distinguent pas explicitement le fait-maison et les aliments industriels, et certains ingrédients spécifiques des AUT (comme les additifs) ne disposent pas d’inventaires environnementaux détaillés.
« Quantifying the Environmental and Food Biodiversity Impacts of Ultra-Processed Foods – Evidence from the EPIC Study »
Article publié le 13 septembre 2025 dans Public Health Nutrition
Lien (article en accès libre) : https://doi.org/10.1017/S1368980025101067
Photo d’illustration issue de la banque d’images Picryl. Crédit : NIH